La Recrue du Mois

Patrick Dion répond au questionnaire de Proust (c'est parce qu'il ne connaissait pas encore celui de la Recrue!)

Sur le site de son éditeur, La Grenouille bleue, Patrick Dion répond au questionnaire de Proust.

Vous vous êtes toujours demandez quel défaut pouvait bien avoir ce jeune auteur? Ou encore quel oiseau peut bien aimer un romancier émergent? Suivez le lien!

Le questionnaire de La Recrue - Mylène Durand

1-    Vous publiez votre premier roman. Racontez-nous une autre première fois inoubliable ?

La première chose à laquelle je pense : la naissance de mon filleul, le fils de ma sœur, Simon.  Je l’ai tenu dans mes bras quelques minutes après qu’il soit né, et il me fixait, de ses grands yeux bleus et gris : je l’ai aimé tout de suite. Aussi simple, aussi gratuit, aussi innocent et, j’ose dire, pur que cela. Je ne pourrais pas oublier ce moment.

2-    À quel moment avez-vous su que vous souhaitiez écrire ?

J’ai toujours aimé que l’on me lise des histoires, avant de pouvoir en lire seule. Mais vers 8 ou 9 ans, je crois, j’ai vraiment formulé mon désir d’écrire. J’ai reçu, au Noël de mes 9 ans si ma mémoire est bonne, mon premier ordinateur (usagé). Lorsque j’ai commencé à taper mes propres mots, que je les ai vus apparaître sur l’écran, les ai imprimés, observé leurs formes, lus... j’en étais certaine et je m’en souviens : je voulais écrire.

3-    Avez-vous un rituel d’écriture ?

Un rituel, non. Des préférences, des conditions idéales, oui.
Idéalement, en me levant le matin, accompagnée d’un café bien chaud, en pyjama, disponible, je suis à mon meilleur. Mais il m’arrive aussi souvent d’écrire le soir... c’est plutôt instinctif. Je peux écrire n’importe quand, lorsque je prends le temps de m’asseoir et me relire. Ou lorsque je sens l’envie qui monte.

4-    Avez-vous écrits d’autres types de textes avant de vous tourner vers le roman ?

J’ai écrit des poèmes, des débuts de nouvelles et romans, mon journal (que, j’espère, je n’aurai jamais la lubie de publier !), quelques critiques de livres lus... mais j’ai toujours su que c’est le roman qui m’attirait davantage. Je n’ai rien publié ou presque avant L’Immense abandon des plages. Depuis quelques mois, je flirte avec le poème.

Entrevue avec Annie Cloutier (2e partie)

Par Julie GravelR

Suite de la 1ere partie.

La quatrième de couverture de Ce qui s’endigue présente Annie Cloutier comme une étudiante en sociologie, dont les thèmes de prédilection sont la maternité, la sexualité, la construction de l’identité, le féminisme différencialiste et la sociologie du quotidien. Des thèmes chers à l’auteure qui cherche, par la fiction, à véhiculer ses idées. Par exemple, dans Ce qui s’endigue, elle a traité du thème de la naissance auquel elle attache une grande importance, ayant œuvré plusieurs années comme accompagnante auprès des mères. Annie Coutier a elle-même accouché à la maison, une expérience marquante. L’autre thème qu’elle a cherché à aborder est celui du commerce équitable. Mais elle se défend bien d’être anti-consommation! En fait, Annie Cloutier admet qu’au début de l’âge adulte, elle a eu une phase de révolte. Elle voulait changer le monde, habitée d’une certaine colère. « La colère d’Angéla, c’est moi! », avoue-t-elle. Mais une colère qui s’est apaisée. « Nous vivons dans une époque formidable. On a l’abondance, les enfants naissent bien, on vit longtemps, en santé. L’humanité a toujours poursuivi ce but : se sortir de la subsistance! » Sans compter que notre société permet le destin individuel.

Entrevue avec Annie Cloutier (1ere partie)

Par Julie GravelR

C’est dans l’ambiance chaleureuse d’un café, rue Maguire, que je rencontre Annie Cloutier, l’auteure de Ce qui s’endigue. La jeune femme de 35 ans, mère de trois garçons, publiait fin janvier son premier roman et, alors qu’elle apprivoisait les émotions fortes liées à la nouveauté et à l’hyperactivité de la sortie du roman, elle s’est livrée avec une belle énergie au jeu des questions.

D’entrée de jeu, quand on lui demande de résumer son roman, Annie Cloutier précise qu’au-delà de l’histoire de deux femmes nées le même jour, de leur enfance à leur mort, il s’agit en fait du regard de l’autre. Une réflexion sur les vies parallèles, quand on regarde l’autre en se demandant si ses choix sont plus intéressants que ceux que l’on fait. Cette idée lui est venue après dix ans passés à la maison à élever ses enfants, alors qu’elle rencontrait d’anciennes amies qui avaient maintenant des carrières.

Kafka, Auster, Calvino, Borges... et Martin

Malgré un horaire professionnel chargé - il est membre du conseil municipal de Gatineau depuis 2005 -, Patrice Martin a fort gentiment accepté de répondre à quelques questions transmises par courriel. Aucun doute possible, on reconnaît bien la subtilité de l'auteur du Chapeau de Kafka derrière ces réponses.

Quelle motivation vous a-t-elle poussé à gruger du temps sur votre horaire professionnel pour commettre un premier roman?

Impossible de dire pourquoi mais, depuis longtemps, j’avais le goût de tenter l’aventure roman.  L’ébénisterie, les collections de papillons ou l’idée de participer à un marathon ne m’ont jamais attiré, mais mon goût de la lecture semble m’avoir mené à l’écriture.  Plus concrètement, je dirais que la motivation première a été la curiosité.  J’étais curieux de voir si je pouvais commencer et finir quelque chose qui pourrait mériter le nom de  « roman ».

Pourquoi avoir choisi de rendre hommage à Kafka, Auster, Calvino et Borges? Quels liens établissez-vous entre leurs différents styles?

Avant d’être de grands écrivains, on sait (et on sent) que ce sont tous de grands lecteurs.  Des écrivains qui, par l’entremise de personnages et d’histoires, communiquent avant tout le goût de lire.  Ce sont aussi des artistes qui aiment jouer avec l’écriture, avec l’architecture du roman et pour qui le lecteur n’est pas limité à un rôle passif mais doit, d’une façon ou d’une autre, faire sa part pour donner un sens au texte.

Enfin, ce sont des auteurs qui ont beaucoup d’humour, pas nécessairement exprimé de façon tarte à la crème mais plutôt subtilement : Borges qui dans une nouvelle se rencontre lui-même à une autre époque de sa vie et tente de se prouver que c’est impossible; Auster qui apparaît dans son propre récit ou Calvino qui parle au lecteur comme s’il était débout devant lui.  Kafka, quant à lui, pousse et pousse tellement les limites du réel qu’il en vient à mériter son propre adjectif parce que ceux qui existent déjà ne peuvent le décrire !

Quand je les imagine au travail, ce n’est pas l’image de l’auteur qui en arrache mais plutôt celle de l’écrivain qui s’amuse en écrivant et veut faire sourire son lecteur.

Privilégier les émotions

par Lucie

Jour de tempête, je peine en arpentant les rues enneigées de la ville à la vitesse de la tortue. Enfin, je rejoins Danielle Trussart à notre point de rendez-vous, chez Byblos, un petit café sympathique du Plateau. Je dépose mon sac, mon ordinateur, prends une seconde pour respirer. En quelques phrases à peine, la connexion est établie avec la lauréate du Prix Robert-Cliche. L'oeil brillant, le sourire aux lèvres, le débit rapide, on la sent entière, multiple, à l'écoute de ses voix intérieures aussi, de celles de ses personnages. Voici une version condensée de la portion enregistrée de l'entrevue.

Entrevue Danielle Trussart (court) -

Pour écouter la version non retouchée (et donc, sensiblement plus longue), c'est ici. (La prochaine fois, je réussirai même à éliminer le bruit de fond... J'ai su un peu trop tard que j'aurais dû l'enregistrer avant, pour pouvoir l'éliminer ensuite! Vive la technologie!)

Rencontre avec Danielle Trussart

Lors de l'annonce du Prix Robert-Cliche, Danielle Trussart a accordé quelques entrevues, dont celle-ci, pour Radio-Canada. À lire ici...

Nicolas Gilbert nous parle de ses lectures

par Lucie

Livrophile fervent, presque livrophage, notre Recrue n'avait pas hésité à me donner rendez-vous dans une librairie, fait suffisamment significatif pour qu'on s'y arrête. Il évoque ici ses lectures.

1 - Êtes-vous un gros lecteur ?

Je lis beaucoup, surtout des romans.

2 - Comment choisissez-vous vos lectures ?

Outre les quelques auteurs, morts ou vivants, auxquels je reviens régulièrement, je choisis mes lectures en fonction de mes lubies du moment. Ces lubies ont souvent à voir avec des projets d’écriture ou de composition. Par ailleurs, je passe énormément de temps en librairie, à lire les quatrièmes de couverture. C’est de cette façon, la plupart du temps, que je découvre de nouveaux auteurs.

3 - Avez-vous un auteur ou un livre culte ?

Je n’irais pas jusque là, mais parmi les auteurs auxquels j’aime revenir souvent : Honoré de Balzac, Jean Echenoz, Louis Hamelin, Charles Dickens, Jacques Poulin, Alain Robbe-Grillet, Marguerite Duras, Milan Kundera.

4 - Quel est votre dernier coup de cœur littéraire ?

Je vous en donne trois :
Bohumil Hrabal : Moi qui ai servi le roi d’Angleterre
Jean-Philippe Toussaint : L’appareil-photo
Mariama Bâ : Une si longue lettre

5 - Comment lisez-vous ?

Lorsque je ne suis pas trop débordé, j’ai l’habitude d’interrompre mon travail (de composition ou d’écriture) deux ou trois fois par jour pour lire. Souvent, j’en profite pour sortir un peu : je vais dans un café.

Quelques questions à Dominique Fortier

Notre Recrue du mois a eu la gentillesse de répondre à quelques questions. Pour ceux et celles qui n'ont pas encore lu Du bon usage des étoiles, voici une autre porte d'entrée dans son univers.

1. Votre livre est profondément original, par sa forme, mais aussi dans les thèmes qu’il aborde. Comment avez-vous eu l’idée de travailler autour de la dernière expédition de Franklin?

L’idée m’est d’abord venue en voyant un documentaire à la télé. L’émission Nova consacrait un reportage de deux heures à l’expédition Franklin, avec témoignages d’experts, reconstitutions historiques, présentation de découvertes récentes, etc. C’était la première fois que j’entendais parler de cette expédition, qui est pourtant, dans le Canada anglais, extrêmement connue ; tous les livres d’histoires la mentionnent, et il y s’agit presque d’un mythe fondateur. Elle a d’ailleurs déjà inspiré plusieurs écrivains canadiens, de Margaret Atwood à Mordecai Richler. Pour ma part, c’est une image en particulier qui m’a frappée et donné le goût d’en faire un livre : lorsque les hommes quittent les bateaux après avoir passé presque trois ans dans les glaces et qu’ils entassent un invraisemblable bric-à-brac (argenterie, cirage à chaussures, boutons de manchettes) dans les chaloupes qu’ils tireront derrière eux, comme s’ils traînaient l’Angleterre tout entière. C’est cette scène, finalement assez courte dans le livre, qui a donné naissance au roman.

Le plaisir d’écrire

par Lucie

L’artiste doit-il absolument créer dans la douleur pour en extraire une parcelle de génie? Jusqu’où doit-il creuser pour y parvenir? Est-il utopique de penser pouvoir écrire un chef-d’œuvre, aujourd’hui, en 2008? Autant de questions posées, avec un humour délicieux, par Sébastien Filiatrault dans son premier roman, paru chez Stanké. D’entrée de jeu, on constate avec un certain soulagement que le jeune auteur de 34 ans n’a que très peu à voir avec le narrateur de ce curieux ouvrage, à prendre au deuxième ou même au troisième degré. « C’est beaucoup trop caricatural pour ça, explique-t-il. Il y a de petites ressemblances, mais ce n’est vraiment pas autobiographique. Je dirais même que le personnage n’est pas réel et je n’ai certainement pas la prétention d’écrire un chef-d’œuvre! C’est essentiellement une blague à la base. Je ne sais pas si je crois, comme mon personnage, au mythe de l’auteur perturbé. Il contient certainement une part de vérité, mais je ne serais pas tenté de l’essayer de cette façon! Mais c’est vrai que la souffrance reste un sentiment qu’on a le goût de crier, qui apporte un soulagement, qu’on est plus porté à communiquer, à développer. Le bonheur, on se contente de le vivre. »