par Mylène Durand
La petite fille, c'est Hélène. Mais il faut l'appeler Joe. Hélène est intelligente, pleine d'une touchante lucidité et d'une sensibilité exacerbée. Une petite fille, encore, qui se prend pour une grande, pour une héroïne : Lady Oscar, rien de moins ! Cette femme déguisée en homme pour protéger Marie-Antoinette. Comme elle, Hélène veut changer les choses, aider son prochain, vivre de Grandes Émotions, de dangereuses aventures.
Hélène a 8 ans. Mais elle dit qu'elle en a 10, pour pouvoir distribuer les journeaux dans le quartier de Limoilou, pas très huppé, où elle habite. Elle en est fière ; elle est, à sa manière, une héroïne. Elle se lève tôt et, avant d'aller en classe, sillonne les rues qu'elle connaît par coeur, tant elle les a foulés de ses petits pas avides d'aventure. Hélène grandit bien vite. Autour de ces trois soeurs, son père, triste et blasé, et sa mère « C'é toute », Hélène vit un paquet d'émotions. Elle observe aussi une panoplie de personnages qui demeurent dans le quartier, tous colorés, parfois bizarres... dont le vieux.
Le vieux, c'est monsieur Roger, voisin, alcoolique, touchant même si un peu bourru... Il est toujours là, sur son balcon, assis sur une vieille chaise à laquelle il est attaché. Hélène et lui développeront une belle ccomplicité.
Marie-Renée Lavoie nous fait donc pénétrer ce monde émouvant : celui de l'enfance d'Hélène, qui ne veut pas être une fille, qui veut être plus vieille, plus forte, meilleure... et qui est entourée de ces vieux fous, désinstitutionnalisés qui ont eux aussi leur histoire. Les personnages sont crédibles, attachants, les dialogues sont justes, tout en finesse : ah, ces dialogues ! Délicieux. On entre dans cet univers, et on ne veut plus le lâcher. Tout est bien construit, et l'écriture y coule, fluide, on se laisse porter par elle.
Les personnages nous habitent encore, après la lecture.
À dévorer. Sincèrement, à lire.
Marie-Renée Lavoie, La petite et le vieux
XYZ, 240 pages
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