En me levant ce matin, Guy A. Lepage a été le premier (magie des réseaux sociaux oblige) à attirer mon attention sur l'article de Steve Proulx sur les cours d'école et leurs blessures qui ne guérissent jamais. Touchée par l'article, j'étais pourtant troublée par le messager qui soulignait qu'il y avait quelque chose de très vrai dans cet article.
J'ai porté ce trouble quelques heures sans trop savoir quoi en faire. Qu'est-ce qui me troublait exactement? Que quelqu'un qui a égratigné tout le bottin des artistes pendant des années, qui les égratignent encore parfois, s'étonne de la méchanceté des enfants? Ou quelque chose de plus personnel...
Il y a quelques années Tout le monde en parle a reçu les gars de RBO et ils sont revenus sur les qualificatifs qui leur collent encore à la peau: le petit, le maigre, le gros... Tiens, le gros. Insistons. Le gros qui n'était pas gros, soit... Mais puisqu'il était appelé le gros, voilà qu'il était poursuivi par les grosses fans qui lui écrivait des pancartes "Je t'aime Bruno". Ouch! les grosses se sentaient le droit de... *Rire gras autour de la table*
C'est sûr que se faire cruiser par une grosse...
Je suis née en 1979. Je vais vous laisser calculer quel âge j'avais quand RBO cartonnait. Mais j'étais grosse. Ou en tout cas, j'avais cet espèce de corps massif, un peu pataud, qui aurait bien convenu à une tomboy mais convenait moins à une rêveuse, poète, sérieuse...
Mon souvenir, c'est que RBO faisait aussi mal que la cour d'école, mais avec plus de cotes d'écoute. La cour d'école ça aurait pu être circonstanciel: la télé c'était le reflet de la vie.
Je ne veux pas dire par là qu'il faudrait censurer. J'étais une enfant sans humour, je ne comprenais rien à RBO, je ne savais pas rire de moi-même, je n'avais aucun sens du second degré... (Mais qui a vraiment un sens du second degré avant 10 ans?) Quoi que je ne crois pas qu'il y ait toujours eu un second degré chez RBO. Et il me semble que le message de cette rencontre à TLMEP était clair: se faire draguer par une grosse, quand même, c'est la poisse... Humour ou pas...
Je veux juste souligner que si les cours d'écoles sont ce qu'elles sont, c'est parce que la société est ce qu'elle est. Le défi des médias de masse, c'est que tout le monde les écoute. C'est que celui qui a cette overdose de violence qui couve en lui trouve les films qui lui parlent. C'est que la petite grosse se heurte sur les humoristes méchants. Et c'est que l'enfant méchant trouve là son école de "bons" gags. On ne fait pas des communications que pour les gens équilibrés, biens dans leur peau et sains d'esprit (en autant que cela ait vraiment un sens).
Je ne dis pas que RBO a gâché ma vie, ceci n'est pas une déclaration de guerre. D'abord ma vie n'est pas gâchée et puis bon, c'est bien complexe tout ça. Mais les petits baveux de ma cour d'école, c'est Guy A. Lepage qui leur a appris à baver.
Je dis juste que Steve Proulx a raison, avoir mal de qui on est, à 6, 7, 8, 9 ans... ça nous suit toute une vie. Si les gars (et la fille) de RBO ne sont pas personnellement responsables de cette douleur qu'il m'arrive encore d'enrouler dans mes draps rouges et vides de mon grand lit queen de grande fille, les médias n'en sont pas innocents. Et vue l'importance sociale qu'a l'humour au Québec, on ne peut pas toujours se draper dans l'excuse du second degré ou dans la liberté créatrice.
D'ailleurs j'ai appris le second degré avec l'âge et mon sens de l'humour s'est bien développé. Je sais rire de moi-même maintenant. Mais je ne ris jamais de mon apparence, et si je le fais, ne me croyez pas. C'est du toc. Cette cicatrice là ne souffre aucune pique. Elle ne tolère même pas les caresses, alors...
Je n'ai aucun humour sur cette question: que du putain de cynisme.
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