J'ai l'humilité (oui, ça m'arrive!) de savoir faire la différence entre les oeuvres que je ne comprends pas et celles que je n'aime pas. Quand je n'aime pas quelque chose, ça implique aussi que je sais expliquer pourquoi.
Certaines oeuvres me laissent dans le néant. Sans prise sur mon appréciation. Je ne comprends pas grand chose à la musique dite savante. Ou même dans les disciplines que je maîtrise mieux, parfois je ne comprends rien. Je ne peux même pas dire que je n'ai pas aimé Le procès-verbal de Le Clézio. J'ai abandonné après 100 pages, complètement perdue, incapable d'entrer dans l'oeuvre.
Il y a malheureusement, dans nos sociétés (et ça ne date pas d'hier), un snobisme inversé. J'appelle snobisme inversé l'intolérance des gens qui ridiculisent la culture qu'ils ne comprennent pas.
Voyez le topo: devant une oeuvre plus opaque, la foule conclut qu'il n'y a pas que les snobs pour faire semblant de comprendre (pensons aux esclandres chaque fois que nos institutions publiques paient cher pour des oeuvres). Dans cette vision du monde, les gens cultivés ne comprennent pas davantage la poésie, la danse contemporaine, les films d'auteurs ou la musique savante que les autres, mais ils font comme si... pour bien paraître. Je trouve que Michel Tremblay a bien illustré cette tentation dans son oeuvre: quand un enfant de milieu populaire s'intéresse à la culture, la tension qui se crée ne dépend pas juste du 'snobisme' du principal concerné, mais aussi de l'ostracisme que lui fera vivre son milieu pour marquer sa différence.
J'aime des livres difficiles. Très minimalistes. Assez abstraits. Souvent poétiques. J'aime les phrases qui sonnent bien sans trop savoir ce qu'elles veulent dire. J'ai moins besoin d'une histoire que d'un style. J'aime la danse contemporaine et j'ai arrêté de chercher une trame narrative. J'aime l'art qui dit quelque chose, même s'il est laid, même s'il a du sang, même si je ne l'accrocherai pas sur mon mur de salon.
Et je comprends souvent (pas tout, mais souvent). Je comprends pour vrai, ça me touche pour vrai, je ne fais pas semblant! Et quand je croise des gens qui me regardent comme une bête étrange, il m'arrive de me demander si c'est vraiment moi la snob!
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