<p>Laurence m'avait laissé ces mots ("JE T'EN PRIE, REVIENS") comm</p>
Laurence m'avait laissé ces mots ("JE T'EN PRIE, REVIENS") comme on envoie une bouteille à la mer. La connaissant, si pudique et pratiquante subtile et déterminée de l'humour comme politesse infinie du désespoir imminent, je compris immédiatement que pour m'avoir écrit ces mots, elle devait avoir plus que dépassé le bout du rouleau et désormais se tenir au dessus d’un vide dangereux.
Je me traitai de tous les noms, en oubliai mes propres tracas et enfin lui téléphonai, fermement décidée à la joindre coûte que coûte même si rien ne répondait.
Ce qui fut le cas.
Le fixe était sur répondeur, le portable n'acceptait déjà plus de messages, et une tentative par l'internet resta sans accusé d'aucune réception.
Alors je pris sac et manteau, clefs d'antivol et casque de vélo (je ne savais pas à quelle heure je pourrais bien rentrer), ouvris la porte pour sortir, retournai in extremis dans la cuisine éteindre sous la soupe, repassai enfin le seuil, fermai en claquant, et dévalai les escaliers. J'y croisai en bas mes fils qui rentraient, un peu surpris de voir leur mère transformée en tornade tardive.
Je revins sur mes pas, afin de leur expliquer au moins la soupe et qu'il convenait de remettre à mijoter un moment avant de pouvoir la déguster, puis repartis de plus belle.
Nos domiciles étaient distants par métro comme par bicyclette, d'une quarantaine de minutes. J'en mis à peine 30, grillant quelques feux rouges et effrayant une ou deux paires de piétons par des raccourcis audacieux. Le code de son immeuble, par miracle, n'avait pas changé et une vieille dame qui venait d'entrer me tint la seconde porte avec cette politesse qu'on avait autrefois avant que politiciens et assureurs ne nous inculquent la crainte de notre prochain.
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