Tête basse, menottes aux poignets… le corps voûté, encerclé de tes hommes, rangers aux pieds, aux bras armés. Ils m’évacuent, m’expulsent, m’entraînent. Ils m’ont arrêté il y a 3 jours. Je n’ai rien pu faire.
Ils m’ont interrogé, demandé mes papiers, je leur ai expliqué, leur ai raconté, pendant des heures…
Mon pays, qui dans un vent de folie étend sa rage et fait couler son sang. La fuite face contre terre, les coups aveugles de fureur, les corps qui tombent, jonchent le sol. Prier le ciel pour que cela cesse, regards d’enfants aux ventres ronds, corps de femmes secs comme le vent, coulant sur les chemins de terre à la recherche d’une frontière, d’une terre d’asile.
Je leur fais toucher du doigt, l’horreur, l’effroi et la douleur, d’une hémorragie interne que rien ne peut plus colmater.
C’est là que je t’ai rencontrée, Terre d’asile.
L’exil : cette peur qui vous tenaille sans cesse, vous prend aux tripes, au moindre bruit, aux claquements de portes. Les nuits de cauchemars, dans les flash back d’où surgissent les visions de folies. Impossible d’oublier cette terre, qui est mienne, visage craquelé ; aujourd’hui ruisselante de larmes aux sangs mêlés, défigurée par la douleur.
Ils ne m’ont pas entendu, sont restés sourds, la sentence est tombée :
- « un sans papier », « un clandestin ».
Mon billet de retour dans leurs mains, ils me poussent vers la porte J10. Destination : Terre de douleurs.
Terre d’asile, terre de mirages, ta porte se referme, dans quelques heures tu m’auras oublié.
Tu pourras toujours tenter de dire, un jour où on te demandera tes papiers, quand on t’interrogera : - « je n’ai rien pu faire», mais tu ne pourras jamais dire que « tu ne savais pas ».
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