La lune dans le caniveau
Plic ploc. Plic ploc. Plic ploc.
La pluie tombe sans faim et mes pieds pataugent dans la boue du chemin. J’ai froid. Enfin, je crois que j’ai froid. La fatigue est si lourde à porter qu’à la prochaine goutte, je risque de m’affaler.
Je déteste les fêtes de Noël et tous ces empressements, ces courses-poursuites vers le cadeau de-la-mort-qui-tue qui finira au fond d’un placard ou dans le ventre d’une poubelle. Tous les ans, c’est la même chose : décembre me colle le blues. Me le colle tellement qu’il me pénètre jusqu’à la moelle des os. Alors j’ai froid.
Ceux que je croise ne me voient pas ou évite mon regard hagard. J’admire leurs mises et leurs joues roses des folies qu’ils vont commettre. De vrais enfants !
Où est passée l’enfant que j’étais ? Celle qui rêvait toutes les nuits que Lune finirait par rejoindre son amoureux, Soleil. Parlons-en de ces rêves stupides ! Celui qui illuminait mes nuits est parti depuis des lustres. Depuis, je traîne comme une âme sans penne. Il fallait vraiment que je sois tordue pour croire qu’un homme de sa classe mourrait à mes côtés !
Les rues dégueulent une foule de plus en plus compacte et la danse. J’en titube. Même le ciel est en deuil, il ne porte pas la lune. Quand la goutte fatale frappe mon crâne, ma chaussure glisse du trottoir vicieux qui s’offre une joie immense à m’enfoncer dans le caniveau.
« T’as vu, maman ? La dame, elle est tellement saoule qu’elle s’est cassé la figure !
- Veux-tu bien te taire ! Je ne vois personne ! Seulement la lune dans le caniveau. »
Le carnet de l'auteure
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