J’avais depuis longtemps cette petite obsession vaguement malsaine, héritée de livres et films qui avaient peuplés mon adolescence. Ce n’est guère original que de souhaiter manger de l’homme, la rubrique des faits divers regorge d’aventures plus ou moins meurtrières, plus ou moins consenties, où un mangeur se penche sur sa victime et la goûte jusqu'à l’os.
Je n’avais pas particulièrement prévu de me lancer dans une aventure de dépeçage d’un de mes semblables. Pour tout dire, je me vois assez mal un couteau à la main découpant un beefsteak dans le dos gras de mon voisin de palier. J’ai su tuer et dépecer un poulet, mais saurais-je m’attaquer à corps plus charnu ? Je continue à en douter.
Toujours est-il que quand j’eus mon accident de vélo la semaine dernière, à deux pas de chez moi, je fus aux anges. Je rentrai calmement à la maison grâce à des endorphines d’une aimable efficacité. Je rangeai mon bout de cuisse coupé, et récupérai qu’un bon verre de sang que je mis aussi au réfrigérateur. De là j’appelai le SAMU car soudain la douleur me rappelait à une réalité moins héroïque. En boitillant, je montai dans leur ambulance, pour rentrer en bus dix heures plus tard, bien suturé et bandé, plutôt épuisé par mon aventure.
Dans la cuisine, je coupai une échalote, ajoutai sel et poivre dans mon petit verre, une noix de beurre au fond de la poêle, et réalisai une sanquette tout a fait identique a celle du poulet. Une légère déception rida mon front. La poêle nettoyée, la noix de beurre ajoutée, je tournai deux ou trois fois mon steak puis le mis dans l’assiette. Je goûtai un petit bout.
Avant de formuler un quelconque commentaire, j'ai rajouté un peu de sel.
Enfin une personne de goût ! On oublie de dire que Narcisse n'est pas mort noyé, il s'est mangé des yeux ! ;-)
Rédigé par : Sarah | 02/08/2005 à 16:44
Ça, j'aime bien. Pour t'aider dans tes désirs, regarde «J'irai comme un cheval fou» de Fernado Arrabal. Tu seras ravie.
Rédigé par : l'Indécrottable | 07/08/2005 à 11:17