Il était encore à sa fenêtre à la regarder, toutes les nuits, aux heures les plus tardives il apparaissait ainsi. Se détachant de l’œil de bœuf en contre jour il se tenait immobile, elle ne pouvait discerner son visage, mais elle devinait ses yeux sur elle, posé comme une interrogation muette. Elle aurait voulu savoir qui il était, ce qu’il pouvait bien lui vouloir ainsi penché sur le vide du haut de sa chambre sous les toits. Si elle avait pu au moins plonger ces yeux dans les siens, elle aurait pu lire ce qu’il attendait, ce qu’il désirait. Elle ne se faisait à ce propos que peu d’illusions, elle savait ce que les hommes attendaient, elle ne le savait que trop bien.
Se penchant elle remonta son bas qui avait tendance à se tirebouchonner sur sa cuisse, il n’était plus de la première jeunesse, tout comme elle, se dit elle. Elle se blottit dans son abri bus jetant un regard vide sur les voitures qui défilaient devant elle. Le dos bien calé contre la vitre ne faisait aucun effort pour aguicher le client. Ces jeux de provocation, rituel de la gagneuse elle ne prenait plus le temps de le jouer. De toute façon elle savait qu’avec ces cinquante ans bien tassés et son corps trop lourd, trop vieux, elle faisait pitié plus qu’envie. Envie de pleurer, cela lui arrivait souvent ces derniers temps. Elle ne pleurait pas sur son sort, ou son statut de prostituée, non. En trente ans de tapin elle s’était faite à sa condition, de toute façon il valait mieux, à moins de vouloir devenir folle, il valait mieux. Elle pleurait sur demain, ce demain vide, si semblable à aujourd’hui, mais avec une nuance, elle ne rajeunirait plus, plus jamais.
Elle se tenait immobile, songeuse, désormais les voitures la dépassaient sans qu’elle y prête attention. La lampe au sodium, ange protecteur de ces activités nocturnes, faisait naître sur elle des ombres mouvantes. On dit que la nuit transfigure les femmes, l’arc électrique de ces ampoules inhumaines ne faisait, au contraire qu’accentuer la lente dégradation de ces traits. Les poches sous ces yeux mornes ressortaient en un obscène maquillage égyptien. Une Cléopâtre vieillie, dont le serpent n’avait pas voulue, Pharaon déchu, pourrissant sous un réverbère au croisement de deux avenues. Son visage était mou, de cette mollesse qu’ont ceux qui n’attendent plus rien, n’espèrent en rien. Elle aurait pu être belle, il fut un temps où elle l’avait été. Mais ce temps lointain, comme ces illusions s’était envolé sous les milliers de coups de reins, portés à ces rêves comme des coups de béliers sur la citadelle de son être. Elle n’était pas vraiment laide, le terme ne convenait pas, elle était usée, vidée de sa substance.
Une voiture ralentit en s’approchant d’elle doucement les phares vinrent caresser ces formes, comme les serres impatientes de quelques prédateurs s’avancent vers sa proie. Elle détestait ce moment, jamais elle ne se sentait autant une marchandise que quand les phares des automobiles venaient soudain la mettre à jour. Comme un objet porté à l’attention d’un acheteur potentiel, les faisceaux jaunes, blancs ou bleuâtres commençaient toujours à la détailler en débutant par les pieds. Plus la voiture avançait doucement, plus longue était l’épreuve à laquelle elle la soumettait. Ces jambes pouvaient faire illusion, elles étaient encore belles gainées dans ces bas résilles, bas qui de plus en plus souvent ces derniers temps étaient filés. Hélas l’illusion cessait arrivée à ces hanches. Trop lourdes, oripeaux encombrants, de plus en plus difficiles à cacher, elle les sentait se déployer encore sous la lumière crue des phares. Comme si animée d’une volonté propre elles voulaient mettre en avant à la vue de tous sa déchéance, le long naufrage de son corps. A ce moment là, elle pouvait presque entendre les pensées de l’homme au volant, lire a sa déception, son hésitation. Déjà il tergiversait, déjà en lui les sentiments contradictoires se livraient batailles. Elle le savait, elle serait choisie sur des considérations économiques tout simplement, elle était vieille, elle était donc moins chère que les jeunesses qui campaient au bout du boulevard. Suprême humiliation, il pourrait aller jusqu’à marchander le tarif, cela arrivait de plus en plus souvent. Dans ces vertes années elle envoyait d’un regard dédaigneux de tels clients se faire pendre ailleurs. Mais à présent, à sa grande honte, elle marchandait chaque client, se sentant comme un steak de bœuf en train d’essayer de convaincre le cuisinier de le faire passer à la casserole.
Les yeux du chasseur mécaniques mettaient ensuite sa poitrine à jour, profond décolleté sur des seins trop lourds. L’armature de son soutien gorge lui faisait mal, griffait sa peau, laissant des marques rouges sur ces deux globes blanchâtres. Tout avait donc tendance à aller vers le bas dans l’existence ? Que ce soit ces seins, ces fesses, ou son moral, tout descendait de manière inexorable vers le bas. Les phares finissaient toujours par arriver à son visage, et la voila révélée au grand jour, offerte à la curiosité malsaine, aveuglée elle se sentait d’autant plus vulnérable. Pas une star sous un projecteur comme elle se le figurait dans sa jeunesse, comme un oiseau pris sous les feux du 36 tonnes qui s’apprêtait à l’écraser. Elle frémit, parfois elle souhaitait que ce monstre mécanique finisse par arriver, pour mettre un terme à cette histoire qui frisait le grotesque et devenait pathétique. Pourtant elle était consciente du fait qu’elle ne se résoudrait jamais à une telle extrémité qu’elle ne se laisserait jamais sombrer, pas encore, pas tout de suite, il y avait Jeremy.
La pensée de son fils lui étreint la poitrine, tandis que la voiture la dépassant accélérait en s’éloignant. Elle allait revenir, souvent elles revenaient plusieurs fois avant de se décider pour l’une des filles. Parfois elle se berçait d’illusions, se disant que le conducteur, peut être un homme marié avec des enfants, éprouvait du remord, comprenait ce qu’il était en train de faire, et sa conscience combattait son désir dans l’habitacle. La vérité était bien plus sordide et elle le savait parfaitement, les voitures qui tournaient ainsi étaient celles de ceux qui ne voulaient payer que la moitié du tarif demandé par les jolies filles venues de l’Est. Pour cela ils se rabattaient sur les vieilles arpenteuses, sur les plus anciennes des filles, alors ils hésitaient, essayant de faire naître le désir pour ces formes grasses, ces seins tombant, ces visages fatigués. Finalement à force de tourner, ils finissait par venir ce désir là, malsain et contraint, il finissait par naître dans leur bas ventre aveugle à toute considération d’ordre moral.
Elle sortit une Camel de son sac, Jeremy allait encore lui reprocher de s’être remise à fumer. Il la regarderait du haut de ces 20 ans, tellement certain de détenir toutes les réponses, et allait lui faire toute une série de remontrance. Jeremy, son enfant, le moteur de sa vie, celui qui doucement s’éloignait d’elle, la fuyait à vrai dire. A cette heure ci il devait être couché, près de lui une pile de livre épais et peut être des papiers griffonnés d’annotations. A l’âge de 12 ans il avait fini par comprendre ce qu’était sa mère, comment elle lui permettait de vivre, et comment elle survivait. Il en avait souffert, tellement, elle s’en rendait compte, elle l’avait bien vu. Tout comme elle voyait les reproches muets que lui lançaient ces yeux à chaque fois qu’ils se croisaient par hasard dans le couloir, lui rentrant de ses révisions, elle partant à la rue en tenue de travail. Il ne disait rien, mais dans ces yeux elle lisait tellement de choses. Souvent il abordait le sujet de son travail, essayant de la pousser à faire autre chose, de trouver une autre voie. Elle secouait la tête, le regardait tristement en haussant les épaules, incapable de lui dire, de pouvoir lui faire comprendre qu’après plus de vingt ans de tapin, on ne savait plus rien faire d’autre. Elle ne pouvait exprimer sa fatigue, lui dire à quel point sa vie lui était pesante, combien elle était lasse. Alors il en rajoutait, lui proposait des stages, des formations en tout genre. Comment pouvait il imaginer qu’elle passe des années derrière une caisse enregistreuse à passer sans cesse des articles devant le faisceau optique d’un laser rougeoyant. Subir les harcèlements, les reproches d’un petit chef à longueur de journée, elle ne s’était pas débarrassée de tout les macs qui avaient au cours de ces années tentés de faire main basse sur elle pour finir ainsi.
Elle se mordit les lèvres, elle savait pourquoi il faisait cela, elle le savait pertinemment, cela eut pu être un geste altruiste, plein de dévotion d’un enfant envers sa mère. Non, il avait honte tout simplement. Elle sentit une pointe d’amertume la parcourir, depuis combien de temps n’était il pas rentré de la fac ? Presque trois semaines maintenant. Il allait revenir, il finissait toujours par revenir, ses sacs pleins de linge sale, il allait revenir et la toiser de son regard plein de reproches. Elle ferait son linge, comme elle le faisait à chaque fois, respirant son odeur, le parfum bon marché qu’il utilisait. Elle aimait ce parfum, car c’était un peu de lui, souvent elle plongeait son visage dans le tissu de ces chemises respirant l’odeur mélangée de sueur et de déodorant. C’était son odeur, son odeur à lui, celle de son fils. Elle chassait alors l’abominable pensée qui s’emparait de son esprit.
« Ce n’est que le parfum d’un mâle, un mâle pareil à ses congénères, peut être que si tu cherches bien tu trouveras aussi sur lui le parfum d’une pute quelconque. »
Une fois il lui avait demandé de lui ramener du parfum de ses courses, elle lui avait acheté un flacon de son parfum habituel. Lorsqu’il l’avait pris entre les mains il avait eu une moue de dégoût.
« Encore ce truc, tu sais ça fait vraiment trop plouc cette odeur, tu pourrais acheter autre choses pour changer. »
Elle avait serré les dents sur sa colère, sur les frissons qui l‘envahissaient elle avait eu envie de lui cracher en pleine figure que ce parfum coûtait trente euros, que pour le payer elle avait sucé le membre d’un homme dont elle ignorait le nom pendant dix minutes. Que durant ces dix minutes là elle avait eu le goût de plastique du préservatif dans sa bouche, que durant dix minutes les mains avaient pesées sur sa tête lui imposant leur rythme. Elle avait eu envie de lui dire que pour ce parfum de plouc un homme dont elle ne savait rien avait joui enfoncé dans sa bouche. Mais elle ne dit rien, elle reprit le flacon de ses mains et repartit au magasin où elle acheta un parfum à soixante euros. Lorsqu’elle revint avec le petit paquet, il avait un petit air désolé, visiblement il s’était tout de même rendu compte qu’il lui avait fait du mal. Comme c’était un jeune mâle de vingt ans, il ne dit cependant rien et quelques jours plus tard tandis qu’un de ses clients haletait derrière elle, son sexe enfoncé dans ces reins elle se dit que voila, le parfum était payé.
Cette fois les larmes coulaient vraiment sur ces joues. Levant les yeux vers le hublot que formait l’œil de bœuf au dernier étage de la belle demeure, elle vit l’ombre toujours présente de l’homme qui l’observait. A travers le rideau de ses larmes à présent incontrôlables elle le distinguait comme ondoyant, comme ces formes floues et mouvantes les jours de grande chaleur. Il était toujours là, l’observant, la jaugeant, sûrement la jugeant. Elle se mit à le haïr, à le détester, car elle ne pouvait pas détester Jeremy. Il était les hommes cet inconnu, tous les hommes, tous ceux qui étaient passés sur elle, au dessus d’elle, sous elle, en elle. Il était tous les membres, toutes les mains, les lèvres et les dents. La nausée tordait son ventre comme si une main invisible lui enserrait les boyaux. Elle aurait voulu crier, se ruer vers la fenêtre et insulter tout le genre humain. Elle serra les dents, sorti un mouchoir de sa poche et essuya ses yeux. Jetant une dernière fois un regard vers la fenêtre entrouverte elle leva son bras vers l’homme, le majeur tendu en signe défi, comme le gladiateur salue César, elle saluait ainsi tout le genre humain. Sans plus le regarder elle s’éloigna doucement vers sa voiture garée un peu plus loin. Cette nuit elle ne serait plus bonne à rien, autant rentrer se coucher. Elle se dit encore que si le connard posté à sa fenêtre attendait une histoire érotique sous un réverbère, ce soir il en serait pour ces frais.
Cette pensée la consolait un peu, un tout petit peu.
étouffant et glauque. Il faudrait lui dire d'aller boire un coup avec Dédé; elles auraient beaucoup à se raconter...
Rédigé par : laurence | 06/06/2005 à 12:55
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