Hakim, couché dans un cercueil, réfléchissait encore. Ha non, pas celui là. Déjà le sombre gaillard au veston noir ouvrait un lourd couvercle de bois d’ébène, et Hakim s’y installait. Ses yeux s’illuminèrent instantanément. Enfin! Quelques vingtaine de questions plus tard, le sépulcre était emballé soigneusement entre des feuilles de bulles que l’on aime tous faire éclater entre nos doigts, un chèque certifié changeait de mains, et un camion démarrait. Hakim préféra s’installer tout près du cercueil, dans la boite du camion, malgré la pluie diluvienne qui lui flagellait le visage. Nerveux, il ne pouvait s’empêcher de se demander s’il avait fait le bon choix, s’il allait convenir, si un jour, il ne s’en lasserait pas. Il faut dire qu’une fois enterré, ce n’est plus le temps de regretter!
C’est à quarante trois ans que Hakim se fit prendre dans les filets de la mort. Rien de plus banal, une attaque cardiaque au volant qui l’avait fait perdre le contrôle de sa voiture en même temps que de tout le reste. On l’a retrouvé sous l’épaisse couche de glace qui recouvrait, ironiquement, le Lac Mort. Doublement mort donc, Hakim fut enterré dans son cercueil quelques jours plus tard.
Cela faisait trente-deux ans qu’Hakim n’avait pas vu la lueur du soleil. Comme il l’avait prévu, mais surtout craint, les coussins du cercueil s’étaient aplatis. Chienne de mort! Il se retourna sur le ventre pendant quatorze autres années, mais rien n’y faisait. Il avait fait une grande erreur. Ce cercueil ne lui allait pas du tout! La prochaine fois, il le ferait faire sur mesure, peut-être avec des petites bulles comme coussin (le danger serait, dans son ennui mortel, de toutes les péter!).
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